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Pense bête
22 mars 2020

Notes de crise

Il en faudra du temps pour faire le bilan de cette crise sanitaire, de la mondialisation, du fonctionnement de l'hôpital public...

Pour l'heure, je vais déjà tenter de documenter ce que je vois. Ca va être bordélique et désordonné.

  • Les causes écologiques

On apprend maintenant que "le nouveau coronavirus aurait été boosté dans sa propagation par la pollution de l’air et plus précisément par certaines particules fines très présentes dans les zones polluées de Wuhan, de Lombardie, d’Emilie-Romagne et d’autres centres urbains".

  • L'état de la recherche en France

Témoignage : https://www.facebook.com/guillaume.duvalperso/posts/2797256683644806

Je suis Bruno Canard, directeur de recherche CNRS à Aix-Marseille. Mon équipe travaille sur les virus à ARN (acide ribonucléique), dont font partie les coronavirus. En 2002, notre jeune équipe travaillait sur la dengue, ce qui m’a valu d’être invité à une conférence internationale où il a été question des coronavirus, une grande famille de virus que je ne connaissais pas. C’est à ce moment-là, en 2003, [...] que l’Union européenne a lancé des grands programmes de recherche pour essayer de ne pas être pris au dépourvu en cas d’émergence. La démarche est très simple : comment anticiper le comportement d’un virus que l’on ne connaît pas ? Eh bien, simplement en étudiant l’ensemble des virus connus pour disposer de connaissances transposables aux nouveaux virus, notamment sur leur mode de réplication. Cette recherche est incertaine, les résultats non planifiables, et elle prend beaucoup de temps, d’énergie, de patience.
C’est une recherche fondamentale patiemment validée, sur des programmes de long terme, qui peuvent éventuellement avoir des débouchés thérapeutiques. Elle est aussi indépendante : c’est le meilleur vaccin contre un scandale Mediator-bis.
Avec mon équipe, nous avons continué à travailler sur les coronavirus, mais avec des financements maigres et dans des conditions de travail que l’on a vu peu à peu se dégrader.
J’ai pensé aux deux congés maternité et aux deux congés maladie non remplacés dans notre équipe de 22 personnes.
J’ai pensé aux pots de départs, pour retraite ou promotion ailleurs, et aux postes perdus qui n’avaient pas été remplacés.
J’ai pensé aux 11 ans de CDD de Sophia, ingénieure de recherche, qui ne pouvait pas louer un appart sans CDI, ni faire un emprunt à la banque.

Témoignage : https://www.welcometothejungle.com/fr/articles/coronavirus-recherche-traitement-medecine

Un virus, c’est un marché.
Avant que l’épidémie ne survienne, pourquoi les autorités auraient débloqué des fonds pour des virus responsables de la goutte au nez ou des éternuements ? Elles n’en voyaient pas l’intérêt. Surtout qu’en règle générale, quand on commence à écrire un projet de recherche pour trouver des financements, le premier élément qu’on écrit sur le dossier, c’est le nombre de morts dans le monde. L’intérêt de la pathologie varie en fonction de sa gravité : sa diffusion et sa mortalité. Cela fait donc cinq ans que je soumets des projets sur le coronavirus du rhume qui sont tous refusés. Pourtant, lorsque je soumets un projet sur le coronavirus du rhume, ce n’est pas pour soigner le rhume, mais bien pour qu’on s’en serve de modèle pour étudier toute sa famille, dont des virus dangereux plus difficiles à manipuler.
  • Toutes et tous migrant·e·s ?

Les Italiens quittent leur pays pour se réfugier... en Afrique, au risque de propager la maladie. On n'ose imaginer les réactions nos fachos de France si des Camerounais·e·s avaient débarqué dans le pays avec le coronavirus.

  • Les témoignages du personnel soignant

On ne compte plus les appels à l'aide pour du matériels pour protéger nos soignant·e·s.

UMP

 

  • Les conseils

ManuBrigitte RestezChezVous

Difficle d'y voir clair avec toutes ces consignes :

Sortez au théâtre malgré le coronavirus

Envoyez vos enfants à l'école

Gardez vos enfants chez vous, on ferme les écoles

Ne fréquentez plus les bars et les restaurants

Allez voter

Restez chez vous

Continuez de travailler

N'assistez pas à l'enterrement de vos proches

Venez dans les champs pour faire ouvrier agricole

Sans oublier que le 29 février, prétextant un conseil des ministres extraordianire sur le coronavirus, l'exécutif en profitait pour décider du 49.3 sur le projet de loi de casse du système de retraites.

Thread dévastateur :

HannahArendt

Et si le meilleur conseil c'était : partez du principe que vous être porteur sain, et que toutes les personnes que vous aller croiser vivent avec quelqu'un d'immunodéprimé (parce que vous n'avez aucun moyen de vérifier si vous l'êtes ou non) ?

  • La stratégie en France : le confinement

Ce n'est donc ni l'immunité de groupe, ni les tests à grande échelle qui ont été décidés en France mais la stratégie du confinement et de la distanciation sociale.

Pourquoi ? Bêtement pragmatique nous explique cette tribune du Monde, on n'avait pas vraiment le choix :

Logistique

On confine donc, pour ne pas engorger les hôpitaux et les services de réanimation qui n'ont pas les moyens d'accueillir de trop nombreux patients, et parce qu'on n'a pas non plus les moyens de tester massivement la population. C'est une stratégie de la temporisation en quelques sorte, et qui ne présage en rien de la suite.

Parce qu'il va falloir ensuite déconfiner, tout en sachant que si le confinement a correctement fonctionné, peu de gens seront immunisés et donc que l'épidémie peut repartir de plus belle.

La stratégie de déconfinement est donc tout aussi importante.

  • Pleins pouvoirs à la police

Rien de très rassurant : on s'achemine vers des villes vides, à l'exception de milices policières qui patrouillent ("Lorsque la police constitue le seul corps social capable de se rassembler en masse, il n’y a pas d’autre mot que "État policier" pour décrire la forme de société dans laquelle nous vivons"). En particulier à Paris, avec le célèbre préfet de police Didier Lallement :

On ne compte déjà plus le nombre de témoignages d'arrestations et d'amendes arbitraires, bien plus souvent de personnes pauvres (SDF par exemple) ou racisées.

On laisse soigneusement aux flics le soin de décider ce qu'est un achat de première nécessité ou non (serviettes hygiéniques : non), ce qu'est une sortie "aux besoins des animaux de compagnie" (nourrir ses chevaux : non) ou "à proximité du domicile" (faire son jogging ET en profiter pour acheter une baguette : non). Malheur à qui a une attestation qui ne plait pas aux cowboys de la police, y compris quand on est en mission Covid-19 pour Santé publique France.

Une recension des contraventions abusives (quand ce ne sont pas des interpellations violentes) a même été lancée.

Une banale stratégie de répression policière à base d'amendes à 38 euros puis réhaussé à 135 euros (première récidive à 1500 euros et 3 récidive à 3750 euros et 6 mois d'emprisonnement) et finalement augmentée à 200 euros.

On ne corrige pas plus l'amateurisme que la volonté en conscience de détruire l'hôpital public par de la répression.

  • Stratégie du choc ?

Jusqu'où notre gouvernement va-t-il aller ? à quel point va-t-il revenir sur les acquis sociaux des personnes qui travaillent ? Des ordonnances sont en préparation (le parlement n'aura donc pas son mot à dire sur le contenu de ces nouvelles dispositions).

https://www.lejdd.fr/Politique/travail-du-dimanche-conges-payes-repos-obligatoire-ce-que-le-gouvernement-veut-changer-3956280

Dans le cadre des discussions sur ce projet de loi d'état d'urgence sanitaire, nos ministres ont refusé d'aménager l'accès à l'IVG. Comme si ce n'était pas une situation d'urgence. Dans une tribune, des professionnels de l'IVG (!?) appellent à des mesures d'urgence et se disent prêts à défier la loi.

Comme déjà pour la reconstruction de Notre-Dame, c'est au monde militaire qu'on fait appel pour gérer la crise. Ainsi Edouard Philippe a nommé un ancien patron de la gendarmerie, Richard Lizurey, pour une mission d’évaluation de l’organisation interministérielle de la gestion de crise du Covid-19. Pas un épidémiologiste, un psychologue ou un médecin : réponse militaire à un incendie de cathédrale, réponse militaire à une crise sanitaire et politique.

Pendant ce temps, le ministre des comptes publics, Gérald Darmanin, lance une cagnotte pour financer l'hôpital public. Fin de la blague.

Nouvelle conséquence de l'état d'urgence sanitaire, les personnes en détention provisoire (donc présumées innocentes et qui n'a pas encore été jugées) peuvent y être prolongées pour 2 à 3 mois suivant les cas et sans juge ni débat contradictoire (et le Conseil d'Etat n'y trouve rien à redire).

  • Les indispensable·s, leur sort et les autres

Et voilà qu'apparaissent les personnes vraiment indispensables à la bonne marche de notre société : les personnels médicaux évidemment mais aussi les caissières, les éboueurs, les personnels EDF, les paysans, les livreurs, les aides à domiciles, les ouvriers des entrepôts logistiques... toutes celles et ceux oublié·e·s, déconsidéré·e·s (socialement  et économiquement) en d'autres temps.

On en profite pour se voir confirmer (s'il en était besoin) que les infirmi·ères·ers en France sont très mal payé·e·s :

RémunérationInfirmiers

Et pendant ce temps les cadres du privé dont l'inutilité sociale explose au grand jour fuient dans leur résidence secondaire voire réservent des jets privés pour s'échapper (au risque de ne pas respecter l'isolement).

Effectivment tout le monde n'est pas confiné, y compris dans des entreprises non essentielles : Michelin envisage une reprise d'activite, des magasins Mc Donald's restent ouverts.

  •  Le sort des plus faibles

Quelles mesures pour les personnes au chômage qui épuisent leurs droits en ce moment sans pour autant trouver du travail (pas facile pendant cette période de confinement) ? Le gouvernement va-t-il décider de prolonger leurs droits ?

Que fait-on des personnes déjà confinées (en prison, en maison d'arrêt, en centre de rétention administrative...) ?

On sait que les prisons françaises sont surpeuplées et donc que les personnes en détentions sont très très vulnérables compte tenu de la propagation du virus. Face au risque de contamination plusieurs prisonniers se sont rebellés pour dénoncer les conditions d'incarcération. Le ministère de la justice prévoit enfin de libérer quelques détenus pour faire de la place.

Certaines préfectures continuent de placer en CRA, le Conseil d'Etat refusant de les laisser fermés et on continue de délivrer des OQTF !?

Et l'Etat français expulse toujours des migrants, au mépris des précautions sanitaires de limitation des déplacements, quels qu'ils soient. Pas de répit pour les politiques racistes d'expulsion. On limite les déplacements, oui mais pas pour les étrangers. Pendant ce temps-là, le Portugal a décidé de régulariser tous les migrants qui ont déposé un dossier (comme quoi, quand on veut...).

  • L'entraide

 L'entraide internationale n'arrive pas forcément d'où on pouvait l'attendre. La France, grande puissance internationale, n'a pas de masques. Ce sera donc... l'Europe la Chine qui se chargera d'envoyer (un million), suivie de... Cuba et du Venezuela.

La république tchèque "soustrait, les Etats-Unis "détourne" mais la France... "réquisitionne" (doux euphémisme).

Entraide

  • Et après ?

Que va-t-il arriver quand tout ça sera passé, quand le confinement sera terminé ? Nous devons le penser dès maintenant.

Interroger les responsabilités (et les responsables) pour commencer, puisqu'il y en a et elles sont importantes. Une mission d'information est lancée à l'Assemblée nationale présidée par... Richard Ferrand, président de cette même Assemblée nationale (non, ce n'est pas un poisson d'avril).

Comme le dit Mathilde Larrère dans cette émission d'Arrêt sur images : "l'après épidémie sera d'autant plus radieux qu'on sera mobilisé pour qu'il le soit".

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