Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Pense bête
2 juillet 2018

Pour des normes sociales alternatives sur l'humour

Convenons (?) d'abord qu'une blague qui surfe sur les clichés racistes (sexistes, homophobes...) est une blague raciste. La question qui se pose ensuite est : cela peut-il être drôle, pertinent, voire favorable à la lutte contre le racisme ? ou cela est-il simplement... raciste ?

Je crois que la limite entre l'humour réussi contre le racisme (ou le sexisme, l'homophobie...) et le racisme, est simple, au moins sur le papier : est-ce qu'on se moque des racisés ? ou est-ce qu'on se moque des racistes ? De ce que je connais d'OSS par exemple, la réponse semble évidente. C'est un film dont le personnage principale est raciste... et teubé. On passe tout un film à le montrer. Donc pas de problème j'imagine. On ridiculise et on se moque ici ouvertement des racistes.

Et pratiquement, comment on s'en sort pour juger ? Il y a sans doute plusieurs critères.
Est-ce que la personne dont je me moque trouve cela drôle (mais vraiment drôle, pas juste qu'elle se sent obligée de rire pour ne pas passer pour une ras-bas-joie ou une pisse-froid) ? J'ai en souvenir une tribune d'Océanerosemarie qui proposait de "rire avec" plutôt que de "rire de". J'ai eu la flemme de relire la tribune avant de la partager. Ca se trouve je la trouverais très naze à la relecture mais le concept m'avait semblé intéressant. Je pense qu'en effet on ne peut pas (plus ?) rire aux dépens de n'importe qui. D'autant plus si la blague vise systématiquement une cible opprimée et qu'elle vient d'une personne en situation d'oppresseur. Blesser des personnes, qui ont déjà suffisamment de difficultés au quotidien, sans qu'on les renvoie systématiquement à des clichés racistes, ça serait sans doute très bien si ça s'arrêtait. Les clichés racistes sont déjà partout (dans la pub, via les contrôles au faciès ou la discrimination à l'embauche), vraiment pas la peine d'en rajouter.
Dans cette autre tribune, on parlait "d'humour inclusif". Et ça m'amène à un autre critère : la blague raciste (mais avec humour et bienveillance) que je fais, en surfant sur les bons vieux clichés et en s'arrêtant juste à ces clichés, est-ce les remettre en question, ou au contraire est-ce les renforcer ? D'après la deuxième tribune, il semble que cela renforce plutôt les clichés, libère la parole raciste...

Au final, faire une blague en utilisant les clichés racistes, avec le risque que ça ne fasse pas rire la personne opprimée, que ça ne soit pas immédiatement perçu comme une dénonciation des racistes (ou comme de l'humour contre les racistes, comme chez OSS) et que ça renforce les clichés racistes, ça me paraît beaucoup trop contre productif... et donc au final pas drôle.
Peut-être qu'il est temps que la lutte contre les représentations sexistes, racistes, homophobes... passe par la création de normes sociales alternatives ? Et qu'on puisse dire : non, ça ce n'est pas drôle, juste raciste, cette remarque est déplacée, honteuse.


L'auteur de BD Marc Dubuisson a récemment fait un thread sur les humoristes et le "on ne peut plus rien dire". Je partage :

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité