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Pense bête
9 mai 2010

Représailles

André écope d'une semaine de prison pour manque de bonne volonté dans l'occultation des fenêtres lors d'un bombardement.

En juillet 1944, je suis appelé au bureau du directeur, je vais être affecté dans une autre usine qui a besoin de main d'œuvre, l'endroit n'est pas précisé. Ce qui m'inquiète c'est que je suis le seul touché par cette mesure, me séparer de mes camarades me contrarie. Le directeur reste muet sur toute demande de précisions. Sur le conseil d'un prisonnier français je prends contact près d'une femme alsacienne à l'Arbeitsamt, le service du travail à Komotau, elle intervient souvent dans les multiples conflits en faveur des prisonniers (elle a semble-t-il de la sympathie pour les Français) mais elle n'a aucune information me concernant : ni sur quelque raison plausible, ni sur le lieu. Je dois être prêt à partir dans quelques jours, je suis très contrarié de quitter mes camarades.

Je me revois, tôt le matin, en gare de Komotau, accompagné d'un Allemand en civil muet comme une carpe et d'un autre Français de mon âge aussi ignorant que moi de notre destination. J'ai bouclé ma valise et mon sac à dos, toute ma fortune est sur ce quai de gare.

Le train est bondé, des civils, qui, nombreux, descendrons à Teplitz-Chonau où se trouve l'embranchement de transit pour Dresde, la capitale de la Saxe. Beaucoup de soldats permissionnaires retournent vers le front de l'est. L'un deux, passablement éméché, crie à tue-tête "Hitler is kaputt", tous les autres voyageurs baissent le nez, il exprime si bien ce que pensent la plupart d'entre eux. Deux gradés malmènent le fauteur de trouble et l'emmène brutalement dans un autre compartiment afin de lui faire comprendre que certaines vérités ne sont pas bonnes à dire.

Le train roule à vitesse moyenne, toujours vers la Pologne, c'est la nuit, notre sbire somnole. Ayant perdu tous mes repères, des idées d'évasion me trottent dans la tête. Mais aller où ? Je suis encore loin de la France et il faut beaucoup de volonté pour tenter une telle aventure, cela doit se préparer, prévoir des relais, il faut avoir un pécule que je n'ai pas, mon camarade fatigué subit comme moi les événements.

Je commence à penser que ce déplacement prend un aspect définitif contrairement au côté provisoire et ponctuel qui m'avait été suggéré au début.

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Commentaires
D
Comme quoi j'ai des lecteurs à l'esprit fin et subtil et qui comprennent ce que je veux dire même quand je ne le dis pas.
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V
Dans la dernière phrase, "ce déplacement prend un suspect définitif ?" un aspect ça sonne mieux non ?<br /> Ou alors une subtilité m'échappe.
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